Podcast : Épisode 4, le développement cosmétique
Épisode l'épisode audio sur le développement cosmétique
- Disponible sur : Épisode 4 : Le Développement Cosmétique
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Le processus pour un développement de produit cosmétique
- L’idéation
- La formulation
- Le développement packaging
- Les tests : stabilité, compatibilité, microbiologique, irritation cutanée et oculaire, efficacité, drop test
- Les enregistrements réglementaires
- La communication
N'hésitez pas à écoute l'épisode précédent sur l'eau micellaire ainsi que le suivant sur l'acide hyaluronique.
Quelles sont les principales étapes avant de mettre un produit cosmétique sur le marché ?
Avant de se retrouver dans nos salles de bains, nos cosmétiques ont dû passer plusieurs étapes cruciales lors de leur développement. Il est important pour vous de connaître ces étapes pour que vous puissiez évaluer vos produits pour ce qu'ils sont vraiment, pour les recherches et l’organisation qu'ils ont nécessitées, les tests qu'ils ont dû passer, mais aussi pour anticiper le prix du cosmétique. Passons à la première étape.
1. Idéation
Bien évidemment tout projet commence par une idée. Et cette phase d'idéation se fait généralement par l’équipe de Développement de nouveaux produits aussi appelé NPD, c'est l’acronyme New Product Development. Pour que le nouveau produit soit réussi, il faut qu’il s’intègre au mieux dans le catalogue de la marque, c'est-à-dire, qu'il corresponde à l'image de la marque sans cannibaliser d'autres produits déjà existants.
Si par exemple la marque a un catalogue de 4 produits et qu'elle cherche à sortir un cinquième produit, il n'est pas judicieux de sortir un deuxième masque visage axé sur l'hydratation car il va faire de l'ombre au premier masque déjà sur le marché.
Il faut que le nouveau concept soit innovant ou du moins qu’il ait un point de différenciation par rapport à ses concurrents directs sur le marché, et qu’il soit adapté aux clients de la marque.
Généralement, les marques différencient leurs collections en fonction des types de peaux. Ainsi on pourrait facilement imaginer qu'une marque ait une collection pour les peaux mixtes, une collection pour les peaux sèches, une autre collection pour les peaux matures, etc. Toutes ces collections auraient des actifs différents en fonction de type de peaux visées. D'ailleurs les collections visant les peaux matures sont vendues plus chères que les collections pour les peaux grasses car la cible clients a plus de moyens.
L'idéation, c'est donc l'innovation ou l'idée phare du concept qui peut se centrer autour de différentes caractéristiques.
Par exemple, l'idée phare pourrait être un nouvel actif très performant, une forme de produit étonnante pour son utilité (un fard a paupière ayant la forme d'un vernis à ongle), un packaging spécial (un packaging ayant une pompe qui permet de mélanger le contenu de deux contenants distincts), une nouvelle technologie de formulation comme la micro fluidique (cette science permet l'obtention de sphères en suspension dans un liquide), une forme de produit super écologique comme les produits rechargeables.
2. Étude de marché
Pour s'assurer de l'originalité de ce nouveau projet il est primordial de faire une étude de marché, c'est-à-dire de lister les projets similaires vendus aux mêmes endroits que le nouveau projet, ayant la même distribution. Lors de l'étude de marché, il est important de souligner les concepts des concurrents, leurs ingrédients clés, les packagings utilisés, les prix de revente. Et pour chaque concurrent il faut identifier les points de différenciations avec le nouveau concept. Il n'y aurait pas d'intérêt pour le consommateur de trouver deux produits tout à fait similaires sur le marché.
Pendant l'étude concurrentielle, il est utile de se rendre compte des concepts que l'on admire et ceux auxquels on n'adhère pas du tout. L'étude concurrentielle peut également préciser les derniers détails du futur concept.
Le but dans cette phase d'idéation et d'étude de marché, est de cerner l'idée et de la décrire la plus précisément possible, il faut donc écrire un brief produit.
3. Le brief produit
Ce brief doit contenir les moindres détails du nouveau concept tant sur le point de vue technique que marketing.
Il faut lister les ingrédients à utiliser, la texture souhaitée en passant par la couleur, l'aspect, l'odeur, la prise, l'application et le fini mais aussi le prix souhaité, la date de lancement, le packaging à utiliser.
4. Formulation
Ensuite lorsque le brief est complet, l'équipe de Product Development le partage aux équipes de formulations pour que des essais textures soient effectués. Le laboratoire de formulation peut être interne à la marque ou externe, si la marque sous traite.
Lorsque les formateurs reçoivent le brief ils vont bien communiquer les éventuels challenges identifiés grâce à leurs compétences en chimie. Ils vont ensuite commander les matières premières auprès des distributeurs avant de pouvoir commencer les premières formules.
Au niveau des matières premières, seuls les actifs sont décrits dans le brief et éventuellement une liste d'ingrédients à bannir (souvent quand on développe un cosmétique naturel) mais les ingrédients fonctionnels, donc ceux qui donnent les textures sont souvent choisis par le formulateur pour répondre à la texture décrite dans le brief.
Ce que j'appelle les ingrédients fonctionnels, c'est les ingrédients utilisés pour l'obtention de la texture et la robustesse du produit - robustesse tant que le point de vue de la stabilité que sur la conservation.
Si vous voulez en savoir plus sur certaines catégories d'ingrédients, je vous invite à écouter l’épisode 3 sur l'eau micellaire dans lequel on parlait de glycols, de tensioactifs, de parfum, de conservateurs et d'ajusteur de pH. Le formulateur se mêle alors à plusieurs difficultés : l'identification des ingrédients qui vont permettre l'obtention de la sensorialité voulue c'est-à-dire tout ce que qu'on va percevoir avec nos sens sur ce produit (donc la couleur par la vision, le parfum par l'odorat, la texture par le toucher) et en plus une bonne stabilité de la texture au cours du temps. Il faut aussi que le formulateur prévoit une bonne protection contre les micro-organismes, un procédé de fabrication adapté et une bonne tolérance peau en fonction de la cible client.
Plusieurs essais vont être faits et envoyé aux équipes de Développement produit, pour que celles-ci puissent essayer le produit et donner leurs retours.
Ainsi, les formulateurs vont prendre en compte les retours pour améliorer le produit. Le but ici c'est de correspondre à l'idée, il n'y a pas de texture universelle parfaite, la texture doit correspondre au concept qui lui est unique. Si mon concept c'est une crème riche pour les peaux qui tiraillent en hiver, je ne vais pas apprécier si les équipes de formulation me soumettent une crème légère qui pénètre rapidement et qui laisse aucun film gras sur la peau même si cette crème à une texture révolutionnaire en termes d'absorption.
5. Le packaging
En parallèle du développement formule, il faut développer le packaging. Les premières étapes sont similaires avec une phase d'idéation, d'écriture de brief, d'étude de marché. Le brief est communiqué à des fournisseurs de packaging pour sourcer le packaging et donné à un designer pour créer le design. Il faut aussi penser au papier voulu, à la sensation de toucher, au sentiment qu'on veut faire naître au consommateur quand il ouvre le produit pour la première fois.
6. Les tests
Après que la texture soit validée, que le produit paraît stable, la phase de tests peut commencer.
Le produit est envoyé en laboratoire microbiologique pour un test que l'on appelle challenge test ou PET.
Ce test consiste à inoculer le produit de micro-organismes, on injecte une certaine quantité de bactéries dans le produit et on mesure la quantité de celles-ci pendant 28 jours. Le but étant que les bactéries initialement incorporées ne survivent pas dans le produit grâce au système conservateur utilisé.
Les bactéries ne se développent que dans un milieu aqueux. Cela signifie qu'un produit sans eau, que l'on appelle un produit anhydre tel qu'une huile ou un baume à lèvres ont beaucoup moins de risque de contamination qu'une crème, qu'un sérum aqueux ou un shampoing.
C'est très important de s'assurer que le produit résiste bien aux contaminations microbiologiques car si le produit est contaminé et que vous l'appliquez sur votre peau, il peut déséquilibrer votre microflore cutanée et engendrer des problèmes de peau comme des furoncles, ou l'impétigo. En plus de ça, les bactéries peuvent dégrader le produit et libérer une odeur nauséabonde, une coloration au produit, etc.
Ensuite et en fonction de la zone d'utilisation, il faut prévoir des tests pour s'assurer que le produit n'engendre pas de sensibilisation. Si le produit s'applique près de l'œil, il faut prévoir un test d'irritation oculaire pour s'assurer que le produit n'irrite pas l'œil. Il existe plusieurs méthodes pour évaluer le potentiel irritant de L’œil dont des méthodes utilisant des modèles au laboratoire, donc pas sur des volontaires.
Petite précision les tests sur les animaux sont interdits en Europe, donc l'absence de tests sur les animaux ne devrait pas être le principal argument marketing d'une marque cosmétique car de toute manière toutes les marques vendues en Europe n'ont pas effectué de test sur animaux - écouter l'épisode sur les test sur les animaux en cosmétique si vous voulez en savoir plus.
Il faut aussi prévoir un test que l'on appelle patch test effectué sur la peau d'un panel de personnes volontaires et rémunérées. Un Patch test c'est quand on applique le produit à tester sur la peau et que l'on recouvre par un film plastique que l'on laisse poser 48h. Le fait de recouvrir le produit va augmenter la pénétration de celui-ci dans la peau et donc augmenter les risques d'irritations. Ainsi, on s'assure que la formule n'est pas irritante ou sensibilisante pour la peau.
Puis, il est possible de tester le produit pour son efficacité. Ces tests ne sont pas obligatoires. Cela dépend des revendications du produit et de la documentation disponible sur les ingrédients. Il existe plein de différents tests d'efficacités différents en fonction de ce qu'on teste : capacité hydratante, exfoliante, nettoyante etc...
7. Le DIP (Dossier Information Produit)
Le produit est presque finalisé. La formule est testée, le packaging est prêt. Il faut maintenant s’assurer que l'on est en règle
En fonction des pays dans lequel le produit est distribué il faut qu'il réponde à différents règlements. Prenons par exemple l'exemple d'un produit qui est vendu en France, il est soumis au règlement 1223/2009 Européen et donc il est obligatoire d'enregistrer le produit sur le portail CPNP, c'est une déclaration à faire sur internet. Et il faut former un dossier information produit qui reprend toutes les informations sur le produit, de sa formulation aux tests qui ont été faits dessus, ainsi qu'aux revendications.
8. Autres
Dernières étapes mais cruciale, une bonne la communication et un bon marketing autour du nouveau lancement produits.
Conclusion
Avant la mise sur le marché, un cosmétique doit être imaginé et décrit dans le brief produit, il doit est formulé au laboratoire, il doit être testé pour assurer l'efficacité de son système conservateur, de sa bonne tolérance cutané et oculaire si le produit est appliqué près de l'œil, il doit être déclaré et enregistré sur le portail CPNP et doit faire l'objet de la rédaction d'un dossier information produit et bien sûr il doit être produit.
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